Qu’est-ce que la recherche-création ?

Revue « Marges » (n°39)

Publié le mercredi 19 avril 2023

RÉSUMÉ

La question de la recherche-création occupe une place de plus en plus importante ces dernières années au sein des réflexions sur l’art. Peut-on vraiment définir ce qu’est un (ou une) artste-chercheur(e) ? Quels savoirs, quelles compétences, quelles méthodologies propres à la création artistique peuvent être développées par ces personnes dans une perspective universitaire et avec quels objectifs ? Comment qualifier leur activité et quels résultats peuvent en être attendus ? Faire œuvre – si ce mot a encore un sens – est-il encore un but à atteindre ou un élément parmi d’autres au sein d’un processus collectif ? Comment l’évaluation de ce type de travail peut-elle être entreprise ? Par qui, avec quels outils, méthodes ou normes ?

Argumentaire
La question de la recherche-création occupe une place de plus en plus importante ces dernières années au sein des réflexions sur l’art. Il s’agit de rompre avec une vision surannée de la création artistique qui voudrait que les artistes se contentent de puiser en eux-mêmes la matière de leurs œuvres (en une sorte d’introspection infinie), au profit d’autres modèles où les œuvres sont davantage ouvertes, processuelles, exploratoires, ne produisant pas nécessairement d’objets mais mettant à profit des réseaux et des formes de collaboration expérimentales entre les domaines les plus hétérogènes qui soient. La recherche-création produit des protocoles expérimentaux, fait appel à des enquêtes, propose des prototypes et refuse simultanément l’idée d’un monde de l’art où seraient clairement distingués les processus d’élaboration ou de fabrication des œuvres, de ceux de leur compréhension, diffusion et appréciation.

Les promoteurs de la recherche-création ont souvent mis en avant le fait que dès la Renaissance certains artistes – Alberti, Léonard, Michel-Ange…– ont combiné des activités de création d’œuvres et d’élaboration de discours, variant les rôles entre artiste, poète, architecte, ingénieur, philosophe, tout en dialoguant avec les esprits les plus avancés de leur temps. C’est d’ailleurs dans le but de valoriser de tels parcours, qu’un certain nombre d’écoles innovantes ont cherché à positionner les artistes en « chercheurs » : du Bauhaus en Allemagne, aux Vhutémas ou à l’Inkhouk en Russie et plus tard du Black Mountain College, à Cal’Arts ou à l’Independent Study Program aux États-Unis. Dans leur prolongement, des départements universitaires d’Arts plastiques ont été fondés, avec l’objectif de relier les savoirs artistiques à des modes de connaissance issus d’autres champs disciplinaires (histoire, sociologie, philosophie, anthropologie…).

Ces départements proposent une alternative à l’enseignement traditionnel des écoles d’art, s’éloignant de leur caractère professionnalisant afin de se rapprocher des méthodologies de la recherche à l’université, proposant parfois des partenariats avec des laboratoires de recherches en sciences sociales ou en sciences exactes. Les artistes qui choisissent d’aller à l’université ou de rejoindre une équipe de recherche au sein d’une école d’art revendiquent alors le statut de chercheurs et la possibilité de préparer des « thèses en art », ce qui n’est pas sans implications pratiques ni sans poser quelques questions.

La revue Marges entend aborder celles-ci en commençant par les plus triviales : peut-on vraiment définir ce qu’est un (ou une) artiste-chercheur(e) ? Quels savoirs, quelles compétences, quelles méthodologies propres à la création artistique peuvent être développées par ces personnes dans une perspective universitaire et avec quels objectifs ? Comment qualifier leur activité et quels résultats peuvent en être attendus ? Faire œuvre – si ce mot a encore un sens – est-il encore un but à atteindre ou un élément parmi d’autres au sein d’un processus collectif ? Comment l’évaluation de ce type de travail peut-elle être entreprise ? Par qui, avec quels outils, méthodes ou normes ?

Axes de recherche

La journée d’études se concentrant sur la période contemporaine, les propositions qui recouperont les axes proposés ci-dessous seront privilégiées :

Définitions de la recherche-création. Peut-elle se pratiquer en solitaire ? La recherche-création est-elle différente selon les arts ? Quels peuvent-être les liens de recherche entre artistes-chercheurs et entre artistes et chercheurs ? Quelles sont les relations avec d’autres domaines de l’institution universitaire ? ;
Qu’est-ce que la formation pour des artistes-chercheurs. Existe-t-il des méthodologies spécifiques ? Comment se fait l’initiation à la recherche ? Qu’est-ce qu’une thèse de recherche-création ? ;
Comment la recherche-création se matérialise-t-elle (lien entre formes écrites, verbales ou non verbales, plastiques, etc.). Quel lien peut exister entre recherche-création et recherche-développement ? ;
Comment s’évalue la recherche-création ? Comment en publier (ou exposer) les résultats ? À qui s’adresse-t-elle ? ;
Quels sont les liens de la recherche-création avec les autres domaines du monde des arts plastiques (critique d’art, commissariat d’exposition, centres d’art, musées, collectionneurs, galeries) ?

Source de la page : https://calenda.org/1065115

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